Une récession aux États-Unis? Pas nécessairement

26 janvier 2023 - 3 minutes 30 secondes
Image d’un drapeau américain
Le recul spectaculaire et inattendu sous la barre des 50 de l’indice ISM des services au début du mois a de nouveau alimenté les discussions sur l’état de l’économie américaine et les risques qu’elle entre en récession. Si la chute en territoire de contraction en décembre laisse entrevoir un risque accru de repli de la production américaine dans l’ensemble, nous sommes d’avis que la baisse est exagérée. Il s’agit probablement plus de bruit que d’un véritable signal (du moins, pour l’instant).

Le recul prononcé de l’indice en décembre se faisait attendre depuis un moment en partie, étant donné les prévisions d’une croissance inférieure à la tendance ainsi que l’écart grandissant de l’indice par rapport à l’indice des directeurs d’achat équivalent de S&P Global équivalent et à d’autres indices régionaux qui évoquaient des perspectives plus modérées quant aux niveaux d’activité. En outre, comme l’indice ISM des services s’est révélé assez volatil récemment, il est difficile d’attribuer une réelle crédibilité aux fluctuations des données sur un mois.

Si nous examinons le rapport en détail, la chute du taux officiel, qui est passé d’un solide 56,5 en novembre à 49,6 en décembre (un taux qui s’apparente à celui d’une récession), est attribuable à d’importantes baisses dans les deux chiffres de l’activité commerciale (production) et des nouvelles commandes. Cette dernière composante, en particulier, a été la plus surprenante, puisqu’elle a enregistré le plus important recul mensuel de l’histoire de la série (exclusion faite du plongeon post-COVID-19 d’avril 2020).

La baisse mensuelle historique des nouvelles commandes pourrait indiquer un ralentissement de la demande (et peut-être une détérioration de la confiance) pour le secteur des services. Toutefois, nous sommes d’avis que cette chute démesurée reflète probablement une révision à la baisse après les dépassements des derniers mois, plutôt qu’un repli soudain de l’activité. Dans ce contexte, nous nous attendons à un rebond de certaines de ces composantes dans le rapport de janvier.

Les données de l’indice ISM des services indiquent également qu’une récession n’est toujours pas imminente. Les moyennes mobiles sur trois mois, moins volatiles, des principales composantes du rapport, comme les nouvelles commandes, l’activité commerciale et l’emploi, montrent toujours que la ligne n’est pas près d’être franchie. En effet, un signal plus fiable de récession a historiquement coïncidé avec des replis simultanés plus marqués et plus prolongés en territoire de contraction de ces trois composantes. À l’heure actuelle, le rapport n’a pas encore fait état d’une telle baisse généralisée, et les données actuelles devraient se traduire par une croissance inférieure à la tendance plutôt que par une contraction pure et simple à court terme.

Le marché de l’emploi exprime son désaccord

Une détérioration soudaine de l’activité dans le secteur des services ne cadre pas non plus avec les conditions actuellement trop serrées du marché de l’emploi et ce qu’elles signifient pour les perspectives de dépenses de consommation. Selon les données les plus récentes, le taux de chômage a de nouveau baissé pour atteindre son plus bas niveau en 50 ans et les demandes de prestations d’assurance-chômage sont toujours modestes, ce qui n’annonce pas de grandes difficultés pour le consommateur. En effet, les dépenses de consommation sont restées plus que solides au cours des derniers mois, en particulier dans le secteur des services, car les consommateurs continuent de profiter de la baisse des prix de l’énergie et d’un budget généralement sain. La croissance du PIB au quatrième trimestre suit un rythme trimestriel annualisé plus près de 4 % que de 3 %, ce qui signifierait une accélération après le rebond de 3,2 % de la production au troisième trimestre.

En plus de soutenir le revenu réel, la baisse des prix de l’essence a également renforcé la confiance des consommateurs au cours des derniers mois. En effet, le signal de récession fondé sur la confiance que nous privilégions est loin de laisser entendre que les consommateurs sont exagérément préoccupés par les perspectives économiques. Autrement dit, les consommateurs américains demeurent fondamentalement en santé financièrement et sont favorables à une augmentation des dépenses au cours des prochains mois.

Somme toute, même si la production et les dépenses de consommation (services) pourraient ralentir au cours des prochains trimestres (ce qui serait conforme à nos prévisions d’une récession au deuxième semestre de 2023), l’état actuel de l’économie ne donne aucune raison de s’inquiéter outre mesure, même si l’indice ISM et l’indice des directeurs d’achat soutiennent le contraire. En fait, la vigueur du marché de l’emploi et les bonnes perspectives économiques donnent à la Fed une marge de manœuvre supplémentaire pour continuer de resserrer sa politique monétaire.

Nous continuons de croire que le Comité décrétera une nouvelle hausse de 50 pdb en décembre à sa réunion de février, les dirigeants de la Fed continuant d’accorder plus d’importance aux préoccupations touchant les perspectives d’inflation qu’à celles concernant le plein emploi. Nous nous attendons à ce que le Federal Open Market Committee (FOMC) atteigne un taux final allant de 5,25 % à 5,50 % d’ici sa réunion de mai.

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Vice-président et stratège, Macroéconomie aux États-Unis, Valeurs Mobilières

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